Le capitaine Saconney, dans un rapport sur les cerfs-volants militaires, explique que les observations aériennes constituent une nécessité de la guerre moderne. Il précise que les armées d'Allemagne et d'Autriche ont opté pour le ballon cerf-volant, et que les Anglais et Russes se sont engagés sur la voie des cerfs-volants montés.
 
Angleterre
   

Samuel Franklin Cody, américain saltimbanque et lanceur de lasso, achète pour son fils, un cerf-volant dérivé des modèles Hargrave. Il transforme cet appareil en lui ajoutant des ailes latérales.

Son système intéresse l’armée anglaise qui le recrute en 1894. Il suit alors de prés les expérimentations sur les différents modèles.

Il met au point, dès 1901, un cerf-volant Hargrave amélioré en lui ajoutant des ailes stabilisatrices et en grandissant les cellules. Il dépose un brevet pour un cerf-volant qui associé en train permettrait de soulever un homme, d’emporter des armes, des lunettes de vue ou des appareils photos.

Le 7 novembre 1903, Cody traverse la Manche de Calais à Douvres, dans un petit canot tracté par son cerf-volant.

1906, en Angleterre, le War Office (Ministère de la Guerre) adopte officiellement le système Cody. Le cerf-volant entre en essai définitif dans l'armée de terre. L'armée alloue à Samuel Cody une pension annuelle de 1 000 Frs pour entraîner les hommes à ce nouveau type de matériel.

Le parti bleu, aux manœuvres du sud de l'Angleterre, en dispose pour son service d'observation.

 
A cette époque, l'armée anglaise rend réglementaire l'usage des trains de cerfs-volants pour élever les observateurs. Les cerfs-volants sont construits de telle manière qu'ils soient utilisables à partir de 8m/s de vent jusqu'à 30m/s (vent de tempête).
     
Toute compagnie est dotée du double matériel (cerfs-volants et ballons captifs).

Les officiers anglais perfectionnent leur système d'attelage grâce aux nouveaux types de cerfs-volants de Cody.

Le système Cody est ainsi conçu :
un premier cerf-volant Le "Pilot Kite", lancé à haute altitude, suivi d'un train de 4 autres les "Lifting Kites", tous reliés au même câble. Enfin, un autre cerf-volant, "Man Carrier Kite" plus important supporte une nacelle et permet au passager de monter ou descendre le long du câble, comme le ferait un téléphérique.

Un levier de manœuvre permet à l'aéronaute de commander la montée, l'arrêt ou la descente de la nacelle le long du câble.
 
Lorsque la hauteur d'observation est atteinte (400 à 600 m) l'aéronaute freine le chariot et arrête le système. En 1908, Cody persuade l'armée de lui prêter le moteur français Antoinette. Les soldats appelleront son nouveau cerf-volant aéroplane motorisé la " Cathédrale volante ". Malgré ses essais réussis en octobre de la même année, le Comité de Défense Impérial (navigation aérienne) décide que les aéroplanes n'ont aucune valeur militaire.
 
Russie
 
Extraits de " cerfs-volants militaires " J. TH. Saconney - Capitaine du Génie : La Russie et l'Angleterre emploient dés 1903 des trains de cerfs-volants pour la marine et l'armée de terre. En Russie, les départements de la marine et de la guerre étudient depuis longtemps la question des cerfs-volants montés. Dans l'armée de terre chaque cerf-volant est indépendant et fixé par un brin spécial au câble principal. Dans la marine le cerf-volant de tête est indépendant au bout d'un brin spécial de 25m de long, les autres sont fixés directement sur le câble principal, qui les traverse. En Russie on a adopté l’attelage Baden-Powel.
 
 
Le cerf-volant de la marine russe, appelé Schreiber est un modèle cellulaire du type Hargrave. La surface portante de ce modèle est de 7,75m pour un poids total de 14,04 kg. Toutes les tringles sont en bambous blancs de première qualité. Les cellules sont en toile de coton. Les brides sont en acier. Leur qualité principale doit être une très grande souplesse. Le train comprend un cerf-volant de tête et six cerfs-volants d'attelage pour une surface totale : 54m2. En magasin les sept cerfs-volants sont ployés les uns sur les autres et occupent très peu de place.
 
Le lieutenant de vaisseau Bolscheff, de l'aérostation navale Russe, qui a suivi en 1902 certains essais du train de cerfs-volants Schreiber, a critiqué le principe de leur emploi :
"Pendant que l’on file le câble, les cerfs-volants se tiennent très mal" - "La nacelle est secouée et balancée d'un côté et de l'autre avec une telle force qu'il faut se tenir afin de se garantir des secousses. L'observateur ressent un froid pénétrant, un vent fort et tranchant fait venir les larmes, ce qui empêche d'observer."

Aérostier convaincu, il admet difficilement l’intrusion du cerf-volant dans la marine russe ; son récit d’ascension est certainement poussé au noir, car si les sensations éprouvées étaient si désagréables (surtout à la montée), comment expliquerait-on les nombreuses ascensions effectuées par les officiers russes, par notre attaché naval, de Cuverville, et enfin par des dames, dont Mme Schreiber ?

D'ailleurs, les observations de M. le lieutenant de vaisseau de Cuverville, attaché naval à Saint-Petersbourg, sont très différentes : "Les résultats des recherches de M. Schreiber sont remarquables. Ce système a fait ses preuves et peut être adopté intégralement. L'attelage est gréé en six minutes. Il faut huit minutes pour le ramener à la main et le démonter. La régularité du vol et l'équilibre sont obtenus grâce à l'emploi des palans et des freins élastiques, idée personnelle de M. Schreiber"